A ce destin scandaleux, nul ne
s’habitue jamais. Jusqu’où ce refus est-il normal ? Quand devient-il
pathologique ? Voici comment l’idée de la mort s’ancre en nous.
« Jusqu’à 32 ans, j’ai tenu la
mort pour une abstraction, explique Sonia. Puis ma meilleure amie est décédée :
un accident de voiture. Ce jour-là, j’ai vraiment réalisé que, moi aussi,
j’étais concernée. Depuis, quand mes parents partent en voyage, je suis un peu
anxieuse. Adepte de l’escalade, je prends moins de risques… »
Pour la psyché humaine, la mort est le paradoxe des
paradoxes. C’est notre destin, donc un phénomène bien ordinaire, pourtant,
écrit le philosophe Vladimir Jankélévitch dans La Mort (Flammarion,
1977), nul ne s’y habitue : « Chaque mort étonne ou scandalise, comme si
elle était la première. » En même temps, nous réussissons à vivre, à
aimer, à agir malgré la menace quasi quotidienne de notre trépas… Serions-nous
héroïques ou inconscients ? Rares sont ceux qui se disent : « Puisque je
dois mourir, je commence dès aujourd’hui à me laisser dépérir, à refouler en
moi tout désir. » En fait, les pathologies directement liées à la peur de
la mort sont peu nombreuses. Cependant, pour définir, dans la relation à la
mort, la limite entre le normal et le pathologique, encore faut-il cerner les
processus par lesquels elle s’ancre en nous, ainsi que leurs effets.
Naître à la mort
« L’expérience de la naissance
est la première expérience de l’émergence de la mort », déclarait
Françoise Dolto dans Parler de la mort (Mercure de France,
1998). Notre venue au monde nous installe parmi ceux qui vont mourir. Elle
implique d’emblée une perte : celle du placenta protecteur vécu par le
nouveau-né comme une part de lui-même. Dès l’âge de 2-3 ans, l’enfant peut
réaliser qu’une personne de son entourage est morte. Mais il s’imagine qu’elle
est partie habiter dans un autre univers d’où elle reviendra peut-être. Pour un
petit, mourir c’est vivre autrement. Inutile de s’inquiéter s’il ne pleure pas
toutes les larmes de son corps et manifeste surtout de la curiosité (« Où
il est papy, maintenant ? »). La mort intrigue les enfants, comme la
sexualité et la procréation. En revanche, une absence de questionnements de sa
part signale une difficulté : l’enfant se tait pour ménager ses parents s’il
saisit leur incapacité à parler de ce décès. Or ce silence risque de le rendre
inapte, plus tard, à assumer la confrontation avec la mort… sans se mortifier.
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